30 mai 2014 5 30 /05 /mai /2014 19:34

Chevalier 5

 

Si j'étais un homme à l'aube de notre siècle, je serais chevalier car il faut être cela pour avoir le droit d'aimer une dame selon les règles de l'amour courtois.


Car en vérité je ne connaissais
Aucun maître plus aimable sur terre
Que la pureté de l’amour inspiré par une jeune vierge,
Qui non seulement réprime les bas instincts de l’homme,
Mais encore lui enseigne nobles pensées et propos agréables,
Courtoisie et désir de gloire,
Amour de la vérité, et tout ce qui fait l’homme.


Je resterais célibataire car, si au hasard d'une visite en quelque endroit, mon coeur se trouve à être troublé à la vue d'une dame, je ne dois exister que pour elle. Mais mon coeur n'aura le droit de chavirer que pour une dame noble et mariée de surcroît, même à mon seigneur.

 

007-01 : Les femmesPour cela, il faudra en tout premier lieu que la dame s'empare de mon coeur. Elle devra alors suivre une règle unique, celle de me séduire en prenant soin d'être toujours belle. Elle devra se parer, se refuser longtemps et ne se donner que parcimonieusement car l'amour est "une passion naturelle qui naît de la vue de la beauté de l'autre sexe et de la pensée obsédante de cette beauté".


Si elle ne me reçoit pas là où elle se couche
pour que je contemple son beau corps noble
alors, pourquoi m'a-t-elle tiré du néant ?

 

Par ce jeu de l'amour, je ne serai plus un homme libre car ma seule motivation sera alors de gagner le coeur de ma dame. Certes, celle-ci sera encore libre puisqu'elle pourra refuser ou accepter l'offrande de mon amour. Mais avant de prendre une telle décision, elle me mettra à l'épreuve pour tester mes valeurs. Je devrais alors me battre à la guerre ou dans des tournois, afin de faire preuve de virilité, de bravoure, de force et de hardiesse.

 

Aucune dame ne saurait se fier à un amant
qui renonce à l'oeuvre virile.

 

003-02 : Les coeursEnfin, si la dame accepte ce don, elle sera à son tour prisonnière et elle devra se livrer corps et âme. Ainsi, elle seule peut me délier de ce lien en refusant mon amour et il me sera impossible d'obtenir les faveurs d'une autre dame tant que ce lien existera.


Si ma dame veut bien son amour donner,
Je suis prêt à le prendre et à rendre grâce,
et à le cacher et à le clamer,
et pour son plaisir, dire et faire,
et ce qui a tant de prix le chérir,
et pour sa louange m'élancer !


Si je parviens à mes fins, je pourrais alors remercier Guillaume, comte de Poitiers qui vécut à fin du XIe siècle. Il aimait tant les femmes qu'il a mis en place ce code chevaleresque pour rivaliser avec le culte marital ordonnancé par la religion catholique et qui sommait aux femmes d'avoir une attitude exemplaire. Il s'agit là d'un amour chevaleresque, un amour sublimé, un culte à la dame qui devient alors une idole. Les valeurs religieuses sont totalement occultées et la seule raison d'être de cet amour courtois est l'assouvissement du désir amoureux, même si l'envie charnelle ne l'est pas.


En ciel un dieu, en terre une déesse


006-05 : Les couplesCertes, vous pourriez être surpris de cette condition puisqu'il s'agit d'un adultère, même sans passage à l'acte. Mais c'est un principe auquel il est impossible de déroger car il permet d'apporter à la dame un bonheur amoureux que ne lui permet pas le mariage arrangé auquel elle a été obligatoirement soumise. Ainsi, aussi surprenant que cela puisse paraître, notre noblesse considère que l'amour puisse exister entre un chevalier et une femme mariée de leur rang et non entre époux.


L'amant doit la prier et se mettre à disposition.
Qu'elle soit son amante ou sa dame de sagesse
la dame doit à l'ami, faire honneur
comme à un compagnon et non comme à un seigneur.


La seule ombre à ce tableau est qu'une femme commettant le péché d'adultère, en s'adonnant aux plaisirs charnels, se voit réserver par l'Eglise les pires châtiments comme la mort ou le déshonneur et son amant subira le même sort. Donc, ne vous méprenez pas surtout ! Je ne chercherai pas nécessairement à obtenir un passage à l'acte, mais plutôt le partage de mes sentiments.


Pour autant, s'il en advenait autrement, il s'agira alors de préserver l'honneur de cette dame, celui de son époux et le mien bien sûr, en vivant notre amour dans le plus grand secret. Je pourrais alors l'aimer en lui déclamant des poèmes de nos amis les troubadours...

 

006-04 : Les couplesJ'ai une telle joie au coeur,
elle me dénature tout.
Fleur blanche, incarnat ou pâle,
me semble froidure.
Avec vent et pluie m'appelle l'aventure,
et s'élève mon chant,
et s'accroit mon mérite.
J'ai tant d'amour au coeur,
de joie et de douceur, 
que l'hiver m'est fleur,
et la neige, verdure.


signature 2

Partager cet article
Repost0

Présentation

  • : Les écrits d'Amellyne
  • : L'écriture est l'âme des souvenirs et de l'imagination, mais l'encre reliera toujours ces deux mondes (Amellyne von Ferradler).
  • Contact

Pages

Catégories